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Cartographie de la physique V2

Ceci est la suite du billet Cartographie
de la physique
. Je propose ici une deuxième version en fonction des remarques faites en commentaire dans le billet précédent et des différentes conversations de vive voix que j’ai eues avec collègues et amis au sujet d’un « découpage de la physique ».



Voici les modifications notables :

– Ajout de la Biophysique que je n’avais absolument pas considérée

– Ajout de la physique du globe qui était également absente

– Ajout de la physique mathématique  que j’avais décidé de ne pas mettre au début mais je me suis
rendu compte que cette branche ne pouvait pas être délaissée ou rattachée à un autre domaine particulier

– J’ai renommé la « physique théorique » en « théories des unifications »
car toutes les théories présentées étaient des théories d’unification

– Ajout de la mécanique quantique relativiste dans les théories d’unification


Pour les versions PDF en meilleure qualité, c’est ici :

Voir le planisphère V2 en haute définition

Voir le schéma V2 du début en haute définition

La question des sciences de l’ingénieur

J’insiste encore sur le fait de ne pas détailler les sciences de l’ingénieur ici car ce n’est pas le but. La physique signifie « l’étude de la nature » étymologiquement, ce que font toutes les disciplines de cette carte (électromagnétisme, mécanique, astronomie, etc.). On ne peut donc pas inclure directement dans la physique l’électronique qui résulte de l’étude de circuits construits par l’homme : pour moi, l’électronique fait parti des sciences de l’ingénieur. En revanche, la physique des semi-conducteurs, elle, étudie le comportement physique (de la nature) des composants électroniques comme les transistors. Certes, la
physique des semi-conducteurs n’est pas explicitement représentée sur ma carte mais elle est implicitement incluse dans la physique des solides qui appartient à la physique de la matière condensée : eh oui, je ne peux pas détailler toutes les spécialités sur la carte, cela serait trop compliqué, prendrait trop de place et la carte ,perdrait de la clarté.

Les relations entre les domaines

Beaucoup de personnes m’ont reproché de ne pas représenter les liens entre les domaines pour bien comprendre les dynamiques qui existent entre les différents domaines comme Nina qui disait en commentaire que pour faire de la physique des plasmas il faut faire « de la mécanique quantique, de la physique atomique, de la thermodynamique (classique et statistique)… et j’en passe! ». En réponse, j’ai proposé de faire une matrice évaluant les relations entre les domaines (car la représentation graphique serait trop illisible). J’ai donc réalisé 2 matrices distinctes :

– Une que j’ai nommé matrice de liaison

– Une que j’ai nommé matrice de dépendance

 Chaque ligne et chaque colonne de ces matrices représente un « grand domaine », i.e. les rectangles bleus dans le schéma ou les continents sur la carte. J’ai simplement écarté la physique mathématique car par définition elle agit avec toutes les disciplines et j’ai également séparé la mécanique classique et relativiste.

Matrice de liaison

Dans la matrice de liaison, on place un ‘1’ à l’intersection de 2 domaines s’il existe un lien (quel qu’il soit) entre les deux et ‘0’ sinon. On voit tout de suite que cette matrice aura une diagonale de ‘1’ et sera symétrique. Le résultat est le suivant :



(Astro :Astronomie / Globe :Physique du gobe / M Cond. : Physique de la Matière Condensée /Thermo : Thermodynamique / EM : Electromagnétisme / Bio : Biophysique / Quant :Physique Quantique / M Cl : Mécanique Classique / M Rel : Mécanique Relativiste /Plas : Physique desPlasmas / Opt :Optique / Unif : Théories d’unification)

Cette matrice contient 55% de ‘1’ ce qui signifie qu’en moyenne, chaque domaine entretient des relations avec 55% des autres domaines (parmi les domaines prédéfinis bien sûr). Dans la dernière colonne, j’ai totalisé le nombre de liens par domaine et on peut voir que c’est l’astronomie, la matière condensée et l’électromagnétisme qui entretiennent le plus de relations. A l’inverse, la biophysique et la les théories d’unifications entretiennent peu de rapports avec les autres domaines.

Matrice de dépendance

Pour affiner la matrice de liaison, j’ai décidé de représenter les dépendances entre les domaines. Je m’explique : à l’intersection d’un domaine X en abscisse et d’un domaine Y en ordonnée, on place un ‘1’ si X dépend de Y. En gros, si le domaine X est nécessaire pour travailler dans le domaine Y, on place un ‘1’. On voit tout de suite que dans ce cas, on aura toujours une diagonale de ‘1’ mais la matrice ne sera plus symétrique car les relations de dépendance ne sont pas
réciproques.  Voici le résultat :


J’ai également totalisé le nombre de ‘1’ (hors diagonale) dans les lignes et les colonnes. On peut alors dire que les totaux des lignes correspondent à la
nécessité d’un domaine car beaucoup d’autres domaines font appel à lui alors que les totaux des colonnes représentent la dépendance d’un domaine, à savoir le nombre de domaines dont il a besoin pour exister.

On s’aperçoit que l’astronomie, la physique du globe, la biophysique et les
théories d’unifications ne sont pas nécessaires aux autres domaines alors que l’électromagnétisme et la physique quantique sont nécessaires dans beaucoup de domaines, on peut alors dire que se sont des domaines plus « fondamentaux » au sein de la physique.

Concernant la dépendance des domaines, l’astronomie est de loin le domaine le plus dépendant car il utilise presque tous les autres (seul la biophysique et la physique du globe ne sont pas nécessaires à l’astronomie). A l’opposé, l’électromagnétisme, la physique quantique et la mécanique classique sont entièrement indépendants dans le sens où il ne font pas appel aux autres domaines de la physique.

Finalement, si vous voulez une vision graphique, c’est possible et on obtient le schéma ci dessous. Ce sont les relations de dépendances qui sont représentées : une flèche de X vers Y signifie «X dépend de Y» :



Une méthode pertinente ?

Je ne pense pas que l’on puisse faire des jugements de valeurs pertinents en se reposant sur ces matrices uniquement pour deux principales raisons. Premièrement, les résultats dépendent très fortement du choix des domaines qui a été fait à la base. Pour avoir une vision plus juste il faudrait inclure tous les sous-domaines et cela ferait une matrice gigantesque très compliquée à remplir. Deuxièmement, j’ai rempli moi-même ces cases sans être forcément spécialiste d’un domaine donc certaines dépendances ne sont peut être pas forcement justifiées (je compte d’ailleurs sur vous pour me corriger). Cependant, ces matrices sont intéressantes pour apprécier qualitativement les relations
entre les domaines de la physique.

Une méthode qui serait plus juste serait de faire des pondérations sur les dépendances car dans ma méthode, il n’y a pas de « mesure » d’une dépendance. Pour reprendre l’exemple de la physique des plasmas, la dépendance à l’électromagnétisme est sans doute plus « forte » que la dépendance avec la thermodynamique. Quoique ce soit très difficile à évaluer. Une méthode serait de regarder le nombre d’articles de journaux qui font référence à des articles de
domaines différents, ce serait ainsi une manière de quantifier les dépendances entre les domaines mais ça demande pas mal de travail… D’autant plus que je me suis cantonné à la physique exclusivement. Il est évident que les relations avec des sciences « externes » existent. Par exemple, la biophysique est fortement liée à la biologie qui ne fait pas partie de la physique.

Bref, le découpage de la physique est à méditer et les relations entre les domaines sont très difficiles à évaluer.

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Ceci est la suite du billet Cartographie de la physique. Je propose ici une deuxième version en fonction des remarques…

About the author

La science pour tous

Ingénieur au CERN (Organisation Européenne pour le Recherche Nucléaire) à Genève, Suisse.

8 Comments

  • Salut,Ton travail est très intéressant! J’aime bien l’idée des matrices de liaison. Refaire le travail en étudiant systématiquement la biblio pour avoir des liens pondérés pourrait presque faire un sujet de stage (de thèse?), ya du boulot!  Sans réclamer de V3, j’ai qq suggestions pour la carte principale: la thermo hors-équilibre comme troisième sous-domaine de la thermo;la physique non-linéaire, chaos, bifurcation, etc… (entre phys math et méca?);un domaine analyse des signaux/théorie de l’information, etc… (qui est peut-être déjà compris dans « sciences de l’ingénieur », mais qui mériterait d’être plus visible à mon sens).et il vaut mieux que je m’arrête là avant de partir dans la définition de sous-sous domaines!
    principale: j’aurai bien aimé y voir explicitement la thermo hors-équilibre; 

  • Bonjour,
    dans une autre idée, il serait intéressant de relier tout ses domaines par rapport à un référenciel.
    Par exemple on pourrait les classer selon l’ordre de grandeur des phénomènes étudiés. Les relations apparaîtraient peut-être plus évidemment ?

    Très intéressant travail en tout cas !

  • C’est une idée interessante cette matrice de dépendance.
    Par contre, tu dis que la physique du globe n’est pas utile à l’astronomie. C’est vrai pour l’instant, mais il se peut qu’avec la continuelle découverte de nouvelles planètes extrasolaires, cela devienne faux un jour.

  • Bonjour Benjamin,c’est un travail impressionnant, et comme toujours la critique est aisée et l’art est difficile, mais comme il me vient des critiques (constructives j’espère), les voici. Je trouve que beaucoup trop de branches sortent de la racine phi, comme si il y avait une racine unique dont, par exemple, l’astronomie et la physique des plasmas soient issues. Il me semble qu’il manque des niveaux de hiérarchisation. Il y a deux axes à considérer : un axe conceptuel (est-ce une théorie classique, quantique, relativiste ?) et un axe « matériel » (quel type d’objet on étudie, quel phénomène on néglige). Il me semble que tu as nettement privilégié le second axe, ce qui donne un aspect un peu éclaté à l’ensemble, et conduit à mettre un peu sur le même plan la mécanique classique et la mécanique céleste, alors que l’une n’est qu’une application de l’autre.J’ai aussi des remarques locales : la physique relativiste doit engendrer deux branches nettement distinctes : restreinte et générale, la première étant reliée à la théorie quantique pour donner naissance aux théorie quantiques de champs et la seconde donnant naissance à la gravité quantique à boucle, qui doit être séparée des autres « théories d’unifications » car ce n’est pas une telle théorie. Enfin, la rubrique théorie d’unification doit être à mon sens appellée « théories quantiques des champs », et doit descendre de trois parents : théorie classique des champs (absent de ton arbre), mécanique quantique et relativité restreinte. voilà en gros les remarques que je peux faire. (ah oui aussi : la physique mathématique est trop transversale pour être casée quelque part : c’est plutôt une branche des mathématiques)

  • il me semble que dans votre carte de la physique, la mécanique est trop loin de la matière condensée, et la biomécanique devrait être en intersection avec la mécaniquedans bio vous pourriez aussi rajouter « évolution » (contraintes physique de…)bien à vousvf

  • Je tenais à vous congratuler pour ce travail étrange à première vue mais salvateur pour les âmes scientifiques égarées (viré pour raisons disciplinaires de ma prépa et avachi par certaines substances dont la décence me garde bien d’écrire le nom obscène, je ne suis guère plus qu’un « néophyte passionné »). Ce petit tour d’horizon du monde scientifique est à même de réveiller les vocations les plus profondément enfouies comme la mienne, et donne une assez bonne vue d’ensemble de l’univers de la connaissance cher à nos anciens. Remodeler un socle cohérent de la science est une entreprise malaisée (comme l’expérience le confirme) mais d’une importance cruciale à l’heure où les spécialistes nous imposent leur vision du monde, libre de tout modèle universel.Encore bravo et keep up the juice …

  • Bonjour,

    Merci beaucoup pour avoir préparé un telle carte. Je prépare moi-même un plan de ce type, ce qui m’a conduit vers ce site après certaines recherches.

    J’ai un petit doute: la physique des particules est classée dans la physique quantique à ce que je vois mais n’y a-t-il pas aussi de la relativité puisqu’on utilise un accélérateur pour produire
    la plupart de ces particules? N’est-ce pas un domaine qui chevauche sur la physique quantique et relativiste en même temps?

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