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Quelle confiance dans les publications ?

Je ne sais pas si vous êtes au courant mais le nombre d’articles scientifiques qui paraissent chaque mois est faramineux (tant en presse de vulgarisation que dans les revues scientifiques spécialisées). Tout est-il bien contrôlé ? Comment s’assurer que ce qui est écrit est vrai ? Eh bien, tout d’abord, la véracité des articles est directement proportionnelle à la notoriété du magazine. Comme les magazines renommés permettent une grande diffusion dans le monde, ils sont très convoités et par conséquent, l’équipe en charge d’analyser les articles avant publication est plus sévère et souvent composée de personnes très spécialisées. Les deux plus grands magazines mondialement reconnus sont Nature et Science, deux magazines américains couvrant tous les domaines scientifiques. Ces deux « géants » de la Science ne sont pas comparables aux autres. Science par exemple est en fait le magazine de la AAAS (American Association for the Advancement of Science), la plus grande communauté scientifique du monde avec 10 millions de personnes. Mais en général les fautes se glissent plutôt dans la presse ultra spécialisée où il y a 30 pékins dans la monde au fond de leur labo qui vont vraiment comprendre l’article. Les fautes passent souvent inaperçues à cause de cela. En général dans la presse vulgarisatrice c’est assez rare de trouver des gros canulars. On trouve quelques rectifications de temps en temps dans les Errata du numéro suivant mais c’est tout.

Mais il faut toujours faire attention. Le plus bel contre exemple et donc le plus grand scandale est d’ailleurs plus que jamais d’actualité. En ce mois de Février, le clonage humain fait la Une du magazine La Recherche. Pourquoi ? Parce qu’on est revenu à la case départ sans toucher les 20 000 francs (et l’euro ?) (bien que dans ce cas ça se chiffrerait plutôt en milliards plus un prix Nobel mais bon). Je ne sais pas si vous vous en souvenez mais l’année dernière, au mois de mai, tous les journaux mettaient le clonage humain à la Une suite à un article paru dans le célèbre magazine américain Science. Le chercheur Coréen W.S.Hwang y disait avoir obtenu des lignées de cellules souches à partir d’un embryon humain cloné. Eh bien non, tout était faux, tous les documents avaient été falsifiés et les cellules obtenues provenaient en réalité d’embryons conçus par fécondation in vitro. C’est comme si Le Monde ou le Times déclarait qu’il y avait une troisième guerre mondiale et qu’en fait c’était des jeunes de banlieues qui brûlaient des voitures à Paris (toute ressemblance avec des faits réels ne serait que pur hasard).

Bref, vous avez compris, tout ce qu’on lit n’est pas la sainte parole, même si ce genre de scandale est heureusement rare. Néanmoins, dans les magazines ultra spécialisés de troisièmes catégorie il y a souvent beaucoup d’erreurs. J’ai d’ailleurs à plusieurs reprises étudié des articles en cours où le prof nous disait « Bon, faut jamais croire ce qu’il y a écrit, alors épluchez l’article et trouvez toutes les fautes » (pas les fautes d’orthographes, mais bel et bien les fautes de raisonnement ou de calcul).

En général, un article paraît dans la presse spécialisée, dans une revue bien précise et si après quelque temps le résultat paraît pertinent alors l’article est publié en vulgarisation avec des mots compréhensibles pour le commun des mortels. Pour illustrer ce cheminement, j’ai choisi un tout petit article de La Recherche du mois de février dans la rubrique Mathématiques accompagné de la publication originale :

Dans La Recherche : 

"La forme de l’oreille

Envoyons un son sur le tympan d’une oreille et mesurons la façon dont celui-ci le renvoie : peut-on, à partir de la structure du son émis et du son renvoyé, déterminer la forme géométrique du canal auditif ? Alexander Ramm, de l’université d’Etat du Kansas, vient de montrer que, sous certaines conditions, la réponse est oui. Il propose un algorithme pour retrouver informatiquement la forme du canal auditif à partir de cette analyse des sons. »

Et maintenant l’article original : http://fr.arxiv.org/PS_cache/math/pdf/0511/0511359.pdf

Je pense que si vous n’avez pas fait de prépa scientifique vous ne comprendrez que le titre (enfin si vous parlez anglais en plus). Voilà pourquoi la vulgarisation c’est cool : on peut comprendre !

Un autre exemple de publication scandaleuse a été réalisé par Alan Sokal aux Etats-Unis de manière consciente. J’ai d’ailleurs écrit un article sur son dernier livre (http://science-for-everyone.over-blog.com/article-1689690.html). Ce Alan Sokal, physicien renommé de l’université de New York en physique a décidé d’écrire un article sans queue ni tête, complètement faux en utilisant des techniques utilisées par les pseudo-sciences voulant se faire passer pour intelligentes. Eh bien l’article a été publié dans le magazine Social Text jusqu’au jour où il a révélé la supercherie en publiant un autre article expliquant pourquoi il avait fait cela et pourquoi l’article n’avait pas de consistance. Voici l’article en question qui s’appelle si on tente une traduction : « Transgresser les frontières : vers une herméneutique transformative de la gravitation quantique », faut vraiment s’accrocher pour comprendre et ça fait 40 pages :

http://www.physics.nyu.edu/faculty/sokal/transgress_v2_noafterword.pdf

et pour tous les articles et autres choses concernant ce sujet :

http://www.physics.nyu.edu/faculty/sokal/

Ca m’énerve j’aimerais vous citer plein de trucs de lui mais les bouquins que j’ai lus de lui sont restés en France chez mes parents et je n’y ai donc pas accès pour le moment. Enfin l’affaire Sokal, c’est un peu différent que notre problématique originale, son objectif était surtout de montrer que les sciences sociales permettent de publier tout et n’importe quoi.

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La science pour tous

Ingénieur au CERN (Organisation Européenne pour le Recherche Nucléaire) à Genève, Suisse.

7 Comments

  • Comme je le disais chez Fabien Besnard, c’est difficile de vulgariser et ca rime souvent avec caricaturer. Je fais de la recherche depuis une dizaine d’annee et je peux dire que le paragraphe avant la photo est une caricature un peut trop forcee de la realite.Ceci dit, ce blog a le merite d’exister et d’eventuellement amener les gens a etre interesse par la science et d’exercer leur esprit critique en creusant davantage pour en apprendre plus.Bonne continuation

  • En tout cas ton attitude est tres positive par rapport a ma remarque qui n’etait pas tres negative d’ailleurs. Ceci dit a n’a tous une image un peu fausse de la realite, et je ne suis me pas certain que ca s’affine avec le temps, ca evolue c’est tout. Mais par rapport a certains points precis pour lesquels on n’a developpe pas mal d’experience, alors la on peut dire qu’on en sait davatange avec le temps. Mais il y a des domaines ou on n’en connais jamais vraiment plus, comme les femmes par exemple ;).Pour Feynman, tu as raison, ses bouquins sont tres bons et ses exposes aussi. Je ne sais pas si tu connais ce lien vers 4 exposes de Feynmanhttp://www.vega.org.uk/video/subseries/8Ce sont de gros fichiers a lire avec realplayer, mais ce n’est pas mal du tout, ca vaut la peine de telecharger, c’est grand public donc ca cole avec le sujet de ton blog.Au plaisir de te lire. Et peut-etre collaborer, on ne sait jamais, ou du moins s’inspirer mutuellement par la lecture de nos blogs respectifs.

  • Au fait j’aime bien ta photo, ca fait genre philosophe, comme certaines photos de Sartre qu’on trouve avec Gougueule (mais t’es beaucoup moins moche que lui, ce qui n’est pas difficile tu vas me dire!)

  • Je ne sais pas si tu lis les commentaires des anciens billets, mais j’en ai postes quelques uns. Je vais sans doute continuer car c’est interessant, mais la je vais me coucher :).

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